12 La lecture d'une grille (d'accords) ; les textes-accords
Publié le 21 novembre 2025, par Charles-Erik LabadilleLa lecture d'une grille
En plus de la tablature, il existe un autre outil, très employé en musique, pour suivre rythmiquement et jouer un morceau : c’est la grille d’accords. Elle utilise les accords par le biais de leurs « noms » dont nous venons de voir le principe de composition. La grille va permettre de jouer les accords en mesure, le plus souvent avec le même rythme (battement ou arpège) répété sur chaque mesure.
Il faut tout d’abord connaître le type de mesure utilisé dans le morceau. En effet, il existe des chansons qui « fonctionnent » plutôt sur un rythme à 2 temps (mesures à 2 temps), à 3 temps, à 4 temps… Il est indiqué par une fraction notée au début de la grille : 2/4, 3/4, 4/4… Précisons que les morceaux à 4 temps (4/4) sont les plus fréquents.
Quant au tempo (donné par un métronome ou une boîte à rythme), il donne la pulsation du morceau, disons sa vitesse. Une noire à 120 est une des vitesses les plus courantes, disons « moyenne ».
Dans une grille, un carreau représente une mesure, c’est tout ce qu’il faut retenir pour l’instant. Cette grille se suit de gauche à droite et de bas en haut en jouant les accords dont les noms sont écrits dans chacun des carreaux. 1 seul nom d’accord dans 1 carreau : il dure 4 temps. 2 noms d’accords dans 1 carreau : chacun dure 2 temps. 4 noms dans 1 carreau : chacun dure 1 temps. Une double barre avec deux points (barre de reprise) vous indique d’aller à la précédante et de rejouer la portion de grille située entre les deux doubles barres.
Prenons un exemple avec une chanson formidable, « Le parapluie » de Georges Brassens.
Le couplet (Il pleuvait fort) se joue deux fois (barres de reprise) avec un accord par mesure, 8 temps de LA (2 carreau), 4 temps de FA#7 (1 carreau), 4 temps de SIm (1 carreau). Ni les placements des paroles, ni le travail de la main droite ne sont indiqués. On sait juste quels sont les accords et quand en changer ; on comprend alors que la grille est surtout un outil apprécié par les musiciens, et dans le cadre de la chanson, par les accompagnateurs.
Pour revenir à la main droite, il suffit d’appliquer un battement ou un arpège bien choisi, toujours le même motif qui se répète sur chaque mesure. Pour Brassens on connait tous sa préférence : deux basses alternées jouées par le pouce séparées par un groupe de cordes aiguës (cordes 1 2 et 3) pincées simultanément par l’index, le majeur et l’annulaire. Poum (la basse 1), Tsing (les 3 doigts), poum (la basse 2), Tsing (les 3 doigts, cf. l’arpège Brassens). Notez néanmoins que sans notre grande culture musicale, on ne saurait pas trop quoi faire de cette main droite… Dans ces cas-là, on peut toujours jouer des noires en battements (en fait, faire des pompes), ça ne fonctionne pas trop mal.
Pour le refrain (Un p’tit coin d’parapluie…), on passe sur certaines mesures à deux accords par carreau (SIm / MI7), donc 2 temps sur chaque. On termine par une sorte de petit « boui-boui » (un signe de renvoi) qui nous ramène à l’endroit où il est écrit dans la grille (ou dans la partition), ici au début du 3ème couplet.
Si la grille vous indique donc quels accords faire à la main gauche (ce qui exige néanmoins de les connaître par cœur !) et pour combien de temps, le travail de la main droite n’est jamais renseigné comme dans une tablature qui est donc plus complète. Précisons enfin qu’une grille peut être écrite avec les noms d’accord en français, mais aussi en américain : le LA devient A, SI c’est B et ainsi de suite :
DO RÉ MI FA SOL LA SI DO = C D E F G A B C
Habituez-vous aux deux lectures car elles sont autant utilisées l’une que l’autre. Ajoutons enfin qu’un accord noté D/f# signifie qu’il s’agit d’un RÉ avec un fa# à la basse.
La lecture du texte-accords
Pour l’accompagnement à la guitare, on trouve également (dans des recueils, sur internet…), les paroles des chansons surmontées, au-dessus de certaines syllabes, par le nom des accords. Il faut particulièrement se méfier de ce type de documentation pour plusieurs raisons.
La première, c’est que les tonalités proposées le sont souvent sans raison particulière ou alors c’est que nous n’avons pas encore compris lesquelles ! Nous avons précisé au chapitre 10 qu’une tonalité peut être changée pour s’adapter au registre vocal du chanteur. Ce peut être également pour simplifier le travail de l’instrumentiste, certaines tonalités étant plus faciles à jouer que d’autres à la guitare (SOL, peu ou pas de barrés). Au final, nous préférerions disposer des tonalités originales (quitte ensuite à appliquer notre « tambouille » en fonction de nos besoins) mais ce n’est pas toujours le cas, loin de là…
Ensuite, les accords proposés ne sont pas toujours les bons, parfois remplacés par les relatifs mineurs ou majeurs, parfois réduits à leur plus simpe expression, accords à 3 sons qui n’ont plus rien à voir avec l’ambiance d’une bossa ou d’un morceau latino, accords parfois tout simplement faux (pour nous enquiquiner ?)…
Enfin, ces accords sont rarement placés au bon endroit, au dessus de la syllabe précise qui correspond au changement d’accord, et que dire quand ce changement intervient sur une période de silence, entre deux mots ou entre deux phrases… Bref, il faut bien avouer qu’il est souvent bien difficile de s’y retrouver, au moins pour le rythme.
Confrontés depuis longtemps à ce genre de problème, nous avons mis en place notre propre système de lecture que nous avons appelé le TA (comprenez Texte-Accord) qui emprunte aux deux procédés précédants et qui, avec un peu de pratique, permet presque de jouer « à vue ». Il n’y a rien de foncièrement nouveau, mais rien n’est non plus laissé au hasard. Les mesures et leurs changements sont indiquées car les syllabes chantées sur le 1er ou le 3ème temps (quand c’est possible) sont en gras souligné (1er temps) et en italique (3ème temps).
Ainsi, dans le TA du Parapluie qui suit : fort, rout’ nait marquent le 1er temps de la 2ème, 3ème, 4ème mesures… et reconstituent une grille visuelle fictive. Les périodes d’attente ou le décalage entre texte et musique sont chiffrés : 2 en début de première mesure signifie qu’il faut attendre 2 temps avant de commencer le chant ; 0,5 correspond à un demi-soupir, 1 à une noire et ainsi de suite. En chanson, le TA devrait contenter à la fois le poète qui y retrouve les paroles, et le musicien qui peut interpréter les accords en mesure.
LA LA LA FA#7
2 Il pleuvait fort sur la grand rout’ Ell’ chemi- nait sans para-
SIm SIm / MI7 LA MI7
pluie J’en avais un vo-lé sans dout’ 0,5 Le matin mêm’ à un ami
LA LA LA FA#7
2 Cou-rant a-lors à sa res- couss’ Je lui pro- pos’ un peu d’a-…